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Licenciement

Réunir des attestations pendant le congé maternité ne constitue pas une mesure préparatoire au licenciement

Le rassemblement d’éléments portés à la connaissance de l’employeur, pendant une période de congé maternité, ne constitue pas une mesure préparatoire à un licenciement notifié ultérieurement. C’est ce que précise la Cour de cassation dans un arrêt du mois de novembre 2019.

Contexte : une protection contre le licenciement pendant le congé maternité

Une femme enceinte bénéficie d’une protection contre le licenciement (c. trav. art. L. 1225-4).

Pendant le congé de maternité, la protection est « absolue » . Tout licenciement prononcé est nul de plein droit (c. trav. art. L. 1225-4 ; cass. soc. 16 juillet 1997, n° 95-42095, BC V n° 277).

Cette protection signifie, que pendant la période de congé, l’employeur ne peut ni adresser de lettre de licenciement, ni faire prendre effet au licenciement.

La règle n’était pas en cause dans cette affaire, mais rappelons que depuis le 10 août 2016, la protection « absolue » a été étendue à la période de congés payés pris immédiatement à la suite du congé de maternité.

L’employeur ne peut pas non plus procéder aux « actes préparatoires » du licenciement (dir. 92/85/CE du 19 octobre 1992, JOUE du 20 ; CJCE 11 octobre 2007, aff. C-460/06). C’est sur ce dernier point, qu’une discussion s’était ouverte le 6 novembre 2019, devant la Cour de cassation.

L’affaire jugée le 6 novembre 2019

L’affaire concernait une salariée, engagée le 21 novembre 2011 en qualité de mandataire judiciaire à la protection des incapables majeurs. Elle avait bénéficié d’un congé de maternité du 15 septembre 2013 au 10 mai 2014 et avait été licencié pour insuffisance professionnelle le 24 juillet 2014 (après l’expiration des périodes de protection applicables à l’époque des faits).

S’appuyant sur la démarche de son employeur, qui avait rassemblé, pendant sa période de congé de maternité, des éléments étayant son licenciement notifié après le congé maternité, la salariée avait saisi les juges pour demander la nullité de son licenciement.

La cour d’appel, comme la Cour de cassation, ont rejeté les demandes de la salariée.

La solution à retenir

Devant la Cour de cassation, la salariée avait un argument factuel : dans la mesure où son employeur, avait procédé au rassemblement d’éléments de preuve et à la collecte d’attestations pour établir son insuffisance professionnelle pendant son congé de maternité, il avait réalisé des « actes préparatoires » au licenciement, ce qui rendait nul ce dernier.

La Cour de cassation a refusé de suivre l’argumentation de la salariée et a confirmé le raisonnement des juges d’appel en indiquant que « la simple réunion par l’employeur, au fur et à mesure de leur signalement, d’éléments relatifs aux dysfonctionnements qui étaient portés à sa connaissance ne pouvait pas être considérée comme une mesure préparatoire à un licenciement ».

La Cour de cassation avait déjà affirmé qu’il était interdit à l’employeur de réaliser des « mesures préparatoires au licenciement » pendant le congé de maternité (cass. soc. 15 septembre 2010, n° 08-43299, BC V n° 182 ; cass. soc. 1er février 2017, n° 15-26250 D).

Elle avait cependant précisé, que « des propositions de reclassement, adressées à la salariée pendant son congé de maternité et préalables au licenciement pour motif économique, n’étaient pas des « mesures préparatoires », car elles avaient pour objet d'éviter le licenciement (cass. soc. 14 septembre 2016, n° 15-15943, BC V n° 163).

Dans la présente affaire, la Cour de cassation donne une nouvelle illustration de ce que n’est pas une mesure préparatoire, au regard de l’objet de la mesure. L’employeur s’inscrivait ici dans une volonté de contrôle des missions confiées, afin que l’activité de son association soit la plus efficiente possible. Cette démarche de contrôle (émanation directe de son pouvoir de direction) et les éléments portés à sa connaissance de manière incidente, n’avaient pas pour objet de licencier la salariée.

Période de protection dite « relative »
Ce n’était pas en cause dans l’affaire jugée le 6 novembre 2019, mais rappelons que la salariée enceinte est aussi protégée avant le congé de maternité (pendant sa grossesse), ainsi que pendant les 10 semaines qui suivent la période de protection absolue, constituée par le congé de maternité et les éventuels congés payés directement enchaînés. Mais cette protection n’est que « relative ». Un licenciement pour faute grave non liée à la grossesse, ou impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou l’accouchement est possible (c. trav. art. L. 1225-4).

Cass. soc. 6 novembre 2019, n° 18-20909 D